Étranges créatures : le parc zoologique d’Étretat

Le zoo d’Étretat est né de l’initiative d’André Bercovitz, un administrateur de biens parisien qui s’était installé en 1959 à la villa Moriandre, rue Offenbach ; cette agréable maison à loggia, qui portait auparavant le nom de villa Les Lierres, avait appartenu à Paul d’Ocagne, ingénieur des Arts et Manufactures.

villa Les Lierres, carte postale
La terrasse de la villa les Lierres, cliche Flamant, Archives départementales de Seine-Maritime, cote FRAD076_038_Fi_0435)

Peu de temps après l’acquisition, il aménagea les 3 hectares de parc de sa propriété pour y accueillir des animaux en liberté et en semi-liberté, sur le modèle du parc animalier de Clères, situé à 80 kilomètres d’Étretat, au nord de Rouen, et créé par un ornithologue en 1919 dans le parc à l’anglaise entourant un château.

Article d’Anne Guilbert inséré dans le guide 1968 d’Étretat édité par le syndicat d’initiative
Localisation du parc aux bêtes d’Étretat sur un plan du début des années 1960 (éditions Helvet, Paris)

Situé sur l’éperon s’avançant entre le Petit Val (vallon de Bénouville) et le Grand Val (vallée d’Étretat), le parc s’étend sur une pente exposée au sud-est, offrant la vue sur le village et sur la falaise d’Aval dans le lointain. Ce secteur est occupé depuis le milieu du XIXe s. par des villas fastueuses, comme la villa Orphée, le Donjon et le château des Aygues, qui encadrent la villa Moriandre (http://www.etretat.carnetsdepolycarpe.com/2020/11/09/les-villas-etretataises-et-leurs-noms-un-peu-de-geographie-sociale/).

Vue aérienne du parc aux bêtes en 1966, entre le Donjon (en bordure gauche du cliché) et le château des Aygues (en bas à droite) ; agrandissement du cliché IGNF_PVA_1-0_1966-08-26_C2007-0131_1966_FR1191_0012
Vue aérienne de 1977, montrant l’ancien parc aux bêtes, dans la partie gauche du cliché, et le centre équestre, dans la partie supérieure droite ; cliché IGNF_PVA_1-0_1977-08-11_CIPLI-0381_1977_FR2889-lot2_0548

Le parc zoologique a été inauguré à Pâques 1961 en présence du député André Bettencourt et de 800 personnes. Le parc comptait alors 150 animaux. Rapidement, il fut connu à Étretat sous l’appellation de « parc aux bêtes », une expression plus conforme au parler cauchois.

Carte postale éditée par Monachrome, Cap d’Ail, coll. Sautreuil

À son apogée, le parc accueille environ 400 bêtes appartenant à une centaine d’espèces (des chevaux du Sénégal, 20 chèvres naines du Sénégal, un mouflon des Andes, 13 daims, des cerfs, des ânes, 4 lamas, 2 ours bruns d’Abbyssinie, 24 babouins et mandrills, un chimpanzé-vedette du zoo, 9 kangourous, des pingouins, 4 émeus, des grues, 2 pélicans de Madagascar, 13 flamants roses, des hérons du Mozambique, 3 aigrettes d’Afrique du Nord, un cariama du Brésil, des oiseaux trompettes d’Australie, des faisans dorés, des paons, des perroquets, un toucan, 36 canards, 3 cygnes noirs et 6 cygnes blancs).

Émeus, pingouins et lama, carte postale, clichés J. Pécry, Étretat

Le parc reçoit 6.800 visiteurs en 1963. Il emploie deux soigneurs, un jardinier et une aide. Un salon de thé propose des boissons aux visiteurs.

Nourrissage des cygnes, photographie (probablement François Vincent, Étretat)
Les émeus, au caractère quelque peu irascible, faisaient partie des attractions redoutées du parc ; carte postale éditée par François Vincent, Étretat
Extrait de l’article d’Annie Guilbert
Extrait d’un dépliant publicitaire du Syndicat d’initiative

Le parc s’agrandit vers l’est et se diversifie avec l’ouverture d’un club équestre en 1965, incluant des écuries, un manège, une piste de près d’un kilomètre, un club-house et un terrain de jeux pour enfants. Cette activité vient enrichir l’offre sportive et ludique proposée aux touristes séjournant à Étretat. Dans son extension maximum, le parc et le centre couvrent 11 hectares, au pied de l’antenne relais et autour du réservoir des eaux, et s’étendent au lieudit les Trois Mathildes, entre la route de Fécamp et le chemin de Saint-Clair, jusque sur la commune de Bordeaux-Saint-Clair.


Des bungalows à la silhouette triangulaire caractéristique sont construits au milieu des pins, pour accueillir des cavaliers de passage. Dans la lancée de cette création, un concours hippique national est organisé au Parc aux Bêtes le 22 août 1965 ; il réunit 193 concurrents.

Cygnes et flamants roses ; carte postale éditée par François Vincent, Étretat

Le succès est cependant de courte durée. Le parc zoologique ferme ses portes à l’aube des années 1970 ; le centre équestre lui survit un peu plus longtemps. Désormais, le centre le plus proche d’Étretat pour les cavalier(e)s se trouve sur la commune du Tilleul -bien qu’il porte le nom de domaine équestre d’Étretat (https://domaine-equestre-etretat.fr/).

En juillet 2023, l’artiste havraise Nathalie Letulle fait revivre le souvenir du parc aux bêtes en proposant dix portraits géants d’animaux sauvages dans le parc de l’ancien zoo (https://www.nathalie-letulle.fr/expos.html).

Œuvres de Nathalie Letulle exposées dans l’ancien parc aux bêtes, photo publiée par le quotidien régional Paris-Normandie, 4 juillet 2023
L’ancien parc aux bêtes vu du chemin de Saint-Clair, en mars 2023

Pour en savoir plus :

  • Annie GUILBERT : À Étretat, le parc aux bêtes abrite 400 animaux  venus du monde entier, in Ville d’Étretat, guide officiel 1968, édité sous le patronage de la municipalité, le syndicat d’initiative, l’union des commerçants, le parc aux bêtes d’Étretat, p. 32-37.
  • https://www.hoteletretat.com/blog/un-zoo-etretat (billet du blog de l’hôtel-restaurant le Donjon)
Prospectus du syndicat d’initiative étretatais

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